Le salut de l'Homme dans l'Ancien Testament (par Métropolite Antoine de Souroge)

Je vous renvoie à deux textes. Le premier est celui de saint Paul qui nous dit que ceux qui ont fait le bien en dehors de la loi de l’Ancien Testament, parce que la loi de Dieu était inscrite dans leur cœur ou qui ont fait le mal, seront jugés selon cette loi intérieure. Ceux qui sont tombés ou qui sont restés debout à l’intérieur de la Loi, seront jugés par la Loi. Dans saint Paul, il est absolument clair que la ligne de démarcation ne se place pas au niveau de la succession des événements historiques, — avant ou après Christ — ni au niveau de la confession, mais au niveau d'une vérité intérieure, plus vraie que la Loi écrite.


Je voudrais vous renvoyer aussi au livre de Jean Daniélou : Saints Païens de l’Ancien Testament. Il attire notre attention sur le fait que du point de vue technique, tous ceux qui ont vécu avant l’Alliance sont des païens et que pourtant, toute une série de leurs noms sont inscrits aux calendriers romain et orthodoxe. L'Alliance commence avec Abraham, mais avant lui, nous avons des noms, comme Adam, Abel, Melchisédech, Noé et d'autres encore, qui sont des saints du calendrier, des saints dont l’Eglise reconnaît la sainteté d'une façon explicite. Il n'y a donc pas de doute que le salut est là avant l’Incarnation, mais il est en attente, parce que le salut, dans sa réalité, n'est pas un acte juridique de Dieu, c'est un acte historique : l’Incarnation, la mort, la Résurrection, l’Ascension, la Pentecôte. Ils sont dans l’attente du salut, mais la situation des justes, des pécheurs par rapport à Dieu est différente.


Souvenez-vous de la parabole de Lazare et du riche. Tous les deux sont dans le même Shéol, qui n'était pas nécessairement dans l’Ancien Testament, un lieu de tourments, mais l’endroit où se trouvaient les âmes de tous les hommes dans la séparation d'avec Dieu. La rencontre avec Dieu était devenue impossible et elle n'est devenue possible que par la Résurrection du Christ qui a brisé le mur de séparation. Lazare et le riche sont dans l’attente, mais dans des conditions différentes : Lazare est dans le sein d'Abraham, l’homme riche est dans les tourments. Tous les deux sont pourtant en dehors du mystère de la communion.


Parlant de saint Jean-Baptiste dans ses hymnes, l’Eglise nous dit qu'après sa mort il est descendu aux enfers comme précurseur du Christ, ainsi qu'il l’avait été sur la terre. Et la foi de l’Eglise qui s'exprime par le symbole des Apôtres — document tardif — nous parle de la descente aux enfers de façon explicite : le Christ qui est mort en croix, de la mort du pécheur sans être pécheur, dans la déréliction à la fois humaine et divine ("Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ?"), va là où descendent tous les hommes qui ont perdu Dieu. Il entre dans ce shéol de l’absence de Dieu et, comme le disent les hymnes orthodoxes, l’enfer s'ouvre largement pour saisir un homme et découvre avec horreur qu'il a son Dieu. Et le shéol est détruit : il n'y a plus d'endroit dont Dieu est absent.


Le Psaume 138 nous dit : "Où fuirais-je de devant ta face ? Ton ciel est ton trône ; en enfer tu es aussi". Dans la terminologie chrétienne, l’image semble simple : l’enfer nous apparaît comme l’endroit pittoresque, dantesque où Dieu accomplit sa justice. L'enfer de l’Ancien Testament n'est pas l’endroit où Dieu accomplit ; c'est l’endroit où vont tous les hommes qui ont perdu leur chemin vers Dieu. En termes Psaume ne pose aucun problème. En termes hébreux, elle fait problème car comment Dieu peut-il être à l’endroit où il n'est pas ! La réponse nous est donnée par la mort du Christ et sa descente aux enfers. Les icônes de la Résurrection représentent ou bien la tombe vide ou bien la descente aux enfers dont les portes sont brisées et où le Christ relève ceux qui étaient morts avant sa venue et qu'il est venu sauver.

 

 (Extrait des archives du Métropolite Antoine de Souroge: http://masarchive.org/Sites/Site/French.html)

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