Eglise : Ferment dans le pâte du monde (Patriarche Athénagoras)
Eglise et science« la technique et la
science ne suffisent pas pour édifier une civilisation nouvelle
mondiale. Une
civilisation est impossible sans une base spirituelle. Sinon
c’est
l’affrontement sans issue d’un conservatisme peureux, qui peut devenir
étouffant, et d’une révolution destructrice.
Au cœur de l’humanité en voie
d’unification doit se trouver l’église indivisée. Son action
sera celle d’un
ferment, elle n’exigera rien,
n’imposera rien : Elle rayonnera le sens, la
liberté et l’amour, elle favorisera la fraternité des peuples à l’image
de la
communion Trinitaire, elle dévoilera dans la résurrection le sens
ultime de la
science et de la technique. Eglise
sœur, peuples frères,
tels devraient être le message de l’église.
Former des chrétiens responsables,
c’est leur donner l’exigence de la
justice, non comme idole, mais comme
expérience de l’amour. Cette âme captive qui
cherche sa libération, elle a besoin, pour son existence de créature,
de
certaines conditions terrestres.
Lorsque
nous habillons ceux
qui sont nus, lorsque nous nourrissons ceux qui ont faim et abritons
les
sans-logis, c’est au Christ lui-même que nous le faisons.
Les
pères ont souligné le
caractère relatif de la propriété privée et que l’aumône véritable doit
être
partage. Aujourd’hui cette
inspiration est plus que jamais nécessaire. L’écart s’accentue entre
les nantis
et les affamés.
Quelques
pays riches ou l’on
produit en plus sans savoir pourquoi, ou l’on dépense des trésors en
publicité
pour obliger les gens à acheter des choses dont ils n’ont pas besoin,
de
l’autre cotés des millions d’hommes dégradés physiquement et moralement
par la
misère, des civilisations entières de prolétaires, les femmes déchues
par la
faim, les enfants atrophiés par la nuits…
La
technique connaît un essor inouï, mais
sans autre
finalité qu’elle-même. Le problème est global : le sous-développement
spirituel des riches conditionne le sous-développement matériel des
pauvres.
C’est
pourquoi la formation
de l’homme intérieur a tant d’importance. Seule la force de l’esprit
peut
maîtriser la technique et répondre aux deux problèmes fondamentaux de
notre
époque : le problème social du tiers-monde, et le problème du sens
de la
vie dans les pays riches.
Il
ne faut pas opposer vie
intérieure et amour actif. Plus le sens de la vie plonge ses racines
au-delà de
l’histoire, plus elle peut susciter dans l’histoire un vrai service de
vie.
L’église doit provoquer dans
tous les domaines cet amour créateur. Sans espoir certes d’une
réussite totale
et stable dans l’histoire, ce serait méconnaître les dimensions du mal,
mais
selon une vision totale de l’homme
vivifié par l’esprit, de l’homme qui a
besoin de pain, mais aussi d’amitié, et de beauté, de l’homme qui a un
besoin
d’infini.