Epreuve - Désespoir et guérison par Saint Silouane

Introduction

Même pour les chrétiens, et probablement pour les chrétiens tout particulièrement, Dieu n’est pas toujours facile pour l’homme.  Dans les périodes généralement prolongées, où la grâce abandonne l'âme, Dieu peut parfois lui sembler un  tyran impitoyable.  L'homme qui, malgré tous ses efforts et ses labeurs jusqu'à l'extrême limite, se sent abandonné par la Miséricorde divine, endure de telles souffrances qu'il renoncerait si cela était possible, à toute forme d'existence. Quelle est donc la nature de cette souffrance ?

A travers quelques paroles de Saint Silouane, un des plus grands saints de l’Eglise chrétienne orthodoxe, nous allons cheminer avec lui, sur la route de l’épreuve, de la souffrance, du désespoir et de la délivrance de l’âme humaine.

Paroles de Saint Silouane

[..]. Aucun saint ne peut nous libérer de la nécessité de lutter avec le péché qui vit en nous. Il peut nous assister par ses prières, sa parole et ses enseignements, nous fortifier par l'exemple, mais il ne peut pas nous libérer de l'effort personnel et de l'ascèse. 

[..]. La voie spirituelle du chrétien se présente dans les grandes lignes suivantes: Au début il est attiré vers Dieu par le don de la grâce; et quand il est déjà attiré alors commence une longue période d'épreuves, parfois même durement. Au début de sa conversion, ses prières, à peines formulées, sont exaucées par Dieu. Mais quand vient la période des épreuves, tout change, tout devient difficile.

[..]. Tout se tourne contre lui. En plus de tout cela, il subit le plus terrible et le plus intolérable des tourments, c'est d'être abandonné de Dieu. Alors sa souffrance atteint son comble, car l'homme est frappé sur tous les plans de son être.

[..]. Dieu est infiniment loin, inaccessible, et tous les appels lancés vers Lui se perdent misérablement dans les espaces. Intérieurement, l'âme intensifie son invocation à Dieu, mais elle ne voit ni son aide ni même son attention. La vie devient une perpétuelle souffrance.

[..]. Au moment de l'épreuve, l'âme ne peut l'accepter comme une manifestation de la miséricorde  divine ou de la confiance de Dieu pour elle, comme son désir de faire communier l'homme à la sainteté et à la plénitude de la vie qui est en Lui. L'âme ne sait qu'une chose: Dieu l'a abandonnée  après Lui avoir montré sa Lumière, rendant ainsi ses souffrances bien plus profondes.  Et quand elle est à bout de forces,  il ne  voit pas Dieu  qui se penche miséricordieusement  vers elle.

[..]. Quand l'homme est donc providentiellement abandonné par Dieu, son corps et son âme sont en proie à une immense détresse et à une terreur [..]. Elle est à un tel point accablée par le désespoir, l'horreur et la terreur qu'elle ne trouve plus en elle-même la force pour prier. Elle ne sent pas auprès d'elle son Dieu Protecteur. L'âme s'immobilise alors sur la pensée de Dieu, où dans le meilleur des cas le plus favorable, elle trouve en elle la force d'invoquer le nom de Dieu.

[..]. L'âme descend en enfer [..]. La semence de l'amour divin que l'âme porte dans ses profondeurs engendre alors en elle un repentir dont la force et l'ampleur surpassent la mesure d'une conscience religieuse ordinaire. Versant d'abondantes larmes, l'homme se tourne vers Dieu de tout son être, de toute sa force, et c'est ainsi qu'il découvre la véritable prière qui l'arrache de ce monde pour l'introduire dans un autre monde où il entend des paroles ineffables.  

[..]. Plus tard, lorsque ces épreuves seront passées, il comprendra avec quelle attention il a été gardé sur toutes ses voies par l'ineffable Providence divine

[..]. Il comprit  de quelles armes il fallait se servir pour vaincre [..]. L'âme doit tourner contre  elle-même tout le feu de sa haine, et se condamner, comme son pire ennemi, aux tourments éternels, tout en ajoutant : « Mais Dieu est saint, vrai et béni dans les siècles des siècles ».

Armé de ce glaive, de « cette prière de feu », l'âme se libère de toute crainte et devient invulnérable aux traits de l'ennemi. L'âme ainsi débarrassée de lui, peut se tourner vers Dieu et prier avec un esprit pur.

L'orgueil source de notre souffrance 

[..]. L'ennemi (Satan) est tombé par orgueil. L'orgueil est le principe du péché en l'homme. Celui-ci peut se manifester sous des formes diverses: présomption, vaine gloire, désir de puissance, froideur, cruauté, indifférence aux souffrances du prochain, tendance à la rêverie, suractivité de l'imagination; angoisse, désespoir, haine; envie, complexes d'infériorité; concupiscence charnelle; lancinante inquiétude intérieure, indocilité, crainte de la mort, désir de mettre fin à ses jours.

[..]. Il n'est pas nécessaire que tous les symptômes énumérés soient réunis pour qu'on puisse reconnaître celui qui s'est laissé séduire par des pensées passionnelles, des visions, des hallucinations, d'origine démoniaque.

[..]. Aussi longtemps  que l'orgueil garde de fortes racines dans l'homme, celui-ci reste exposé aux assauts d'un désespoir particulièrement écrasant, proprement infernal et qui fausse toutes ses conceptions de Dieu et des voies de sa Providence.  L'âme orgueilleuse, peut en venir  à voir la cause de  ses souffrances en Dieu. 

Privée de la vraie vie en Dieu, elle voit toutes choses à travers le propre prisme déformant de son état de souffrance maladive, et commence à haïr même sa propre vie  et, d'une manière générale, tout ce qui existe.  Demeurant hors de la Lumière divine, elle en  vient dans son désespoir à considérer l'existence de Dieu comme une absurdité.

Aussi sa haine pour tout ce qui existe et son éloignement de Dieu augmentent-ils de plus en plus. Les hommes de foi échappent à ce désespoir et à cette haine, car c'est par la foi que l'homme est sauvé [..]. L'heure viendra où cette foi fera sortir dans les vastes espaces de la vie véritable et incorruptible dont la splendeur n'est en rien comparable à tout ce que l'on peut connaître sur cette terre.

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