Rêves et Songes

Introduction

Ecoutons ce que nous disent des chrétiens orthodoxes, prêtres, moines et pères spirituels au sujet des rêves et des songes.

 

Père Marc Antoine Costas de Beauregard

L’âme humaine est composée d’une partie passionnée, l’âme psychique, qui réagit de toutes sortes de façons, et d’une partie noétique qui correspond au monde angélique.

A ces deux parties de l’âme correspondent deux types d’expériences nocturnes ou éveillées.

A la partie passionnée de l’âme correspond le rêve sommaire (le lapin étant mauvais, je ne m’en sors pas, je me suis disputé toute la journée….alors je réagis), les réactions de la journée, pas forcément  réactions du corps sur l’âme, mais aussi réactions de l’âme elle-même.

C’est ce qu’analysent les sciences humaines qui voient comment les refoulements des désirs se répercutent dans le domaine des rêves. L’âme répercute ce qu’elle a souffert ou ce qu’elle n’a  pas souffert, ses désirs, ses envies, et cela se traduit en rêves.

L’autre partie, la partie noétique,  a aussi son expérience. C’est du domaine du songe. Cette partie noétique a la possibilité aussi bien en temps de veille qu’en temps de sommeil,  d’être informée par Dieu, par l’intermédiaire des anges.

Freud a beaucoup étudié les rêves qui surgissent dans la première partie de l’âme. Jung a plus étudié la partie noétique de l’âme : la doctrine des archétypes se rapporte à la partie noétique de l’âme.

Les songes sont une information, et ils ont une origine soit divine, soit diabolique, puisque les démons sont des anges. Les Pères sont extrêmement prudents à ce sujet.  Dans l’âme se manifeste des songes à l’état de veille, aussi bien que pendant le sommeil. Ces songes ont leur origine soit dans des choses humaines, soit des réalités divines et célestes. Sur cette base là il fait la distinction entre songe et vision, ce que nous appellerions rêve et songe.

Saint Jean Climaque dit de ne jamais interpréter ses songes soi-même.  Celui qui commence à interpréter ses songes lui-même se perd, car il ne sait jamais du tout à qui il a à faire. La méthode est de confier ce songe à un Père spirituel et de lui demander une explication, comme a fait d’ailleurs le pharaon avec Joseph. Dans le songe de Jacob il s’agirait de manifestations de réalités divines, alors que le rêve produit par un repas copieux est autre chose.

« Lorsque la partie concupiscible de l’âme est poussée vers les passions, les voluptés et jouissances de la vie, l’âme aperçoit les mêmes choses dans ses songes. Si l’irascible la fait se déchainer contre ses semblables, elle ne rêve que d’irruptions et de fauves, batailles et mêlée de serpents et elle discute avec ses adversaires comme dans un tribunal. Si c’est la raison qui est exaltée par la vanité ou l’orgueil l’âme se figure avoir des ailes et volent dans l’air, trôner sur un siège élevé ou bien s’avancer à la tête du peuple dans un cortège de char » (Saint Jean Climaque).

Ces rêves sont la projection à l’intérieur du psychisme des passions, elles-mêmes produite par le désir que l’être humain projette sur le monde.  Au contraire, « Seuls ont des visions véridiques, qu’il ne faut pas appeler songes (c'est-à-dire rêves) mais bel et bien vision et contemplations, ceux dont l’intelligence est devenue simple par l’habitation de l’Esprit et libre de toute importunité et servitude des passions.

Toutes leur curiosité va aux choses divines et leurs méditations à la récompense et à la rétribution futures ; leur vie, bien plus que toute autre vie, est sans souci, sans agitation, calme, pure, pleine de miséricorde, de sagesse, connaissance céleste, et de bons fruits cultivés par l’Esprit »

L’état de l’âme encore déterminée par les soucis du monde, qui manifestent ce souci par des projections imaginales dans le songe, et l’âme qui est dans ce que l’on appelle l’impassibilité, ou apathia, ou la tranquillité, et qui a des visions qui sont de Dieu.

L’âme de l’homme est un lieu de révélation, de manifestation et de connaissance. C’est un lieu de communication soit avec le monde, le monde déchu, détourné du désir de Dieu, soit avec Dieu Lui-même. Ceci introduit à la question de l’illumination de l’âme. Elle passe par un autre élément dans la structure de l’être humain : le cœur.

Saint Jean Climaque

« Les démons de la vaine gloire prophétisent dans les songes. Rusés, ils prennent du présent des conclusions sur le futur, afin que lorsque ces visions se réalisent nous soyons émerveillés et nous nous élevions en pensée comme si nous étions déjà doués du charisme de clairvoyance. Le démon est souvent prophète pour celui qui croît en lui, mais il se révèle toujours menteur pour celui qui le méprise.

En tant qu’esprit il voit se qui se passe en l’air dans ce qui nous entoure, et remarquant que quelqu’un est en train  de mourir il le prédit en songe aux gens crédules. Les démons ne savent rien du futur par prescience. Celui qui croit aux songes manque de jugement. Celui qui au contraire ne leur accorde aucun crédit est plein de sagesse. 

Que nous suffise cette règle, comme une grande vertu, ne pas fier à aucun songe absolument car les songes ne sont la plupart du temps que les idoles des pensées, le jeu de l’imagination ou des railleries et amusements de démons à notre égard ».

Saint Syméon le Nouveau théologien

« Ceux qui ont de véritables visions pendant le sommeil, il ne convient pas d’appeler ces phénomènes des songes mais des visions, sont ceux dont l’intellect, par la grâce du Saint Esprit, simple et libre de toutes pressions exercées par les passions, de tout esclavage envers elles, ceux qui ont les soucis que des choses divines et qui ne pensent qu’aux récompenses et aux biens futurs, ceux dont la vie plus élevée que les hommes est pure, sans distraction, pleine de miséricorde, de sagesse, de connaissances célestes et d’autres bons fruits cultivés en eux par le Saint Esprit. Quant aux autres, leurs songes sont mensongers et désordonnés et tout en eux n’est que tromperies et illusions évidentes ». 

« Les visions sont les manifestations de l’âme et se rapportent à l’état des sens intérieurs. Une partie importante des visions viennent des manifestations des passions». 

Hiéromoine Léonide

Le hiéromoine Léonide, starets d’Optino, disait à son disciple : «  Il ne faut pas se fier aux songes même s’ils s’avèrent vrais dans une certaine mesure car nombreux ceux qui  sont tombés dans l’illusion pour avoir cru en eux ».

Starets Thaddée

Il n’existe pas de mise en sommeil jusqu’au jugement dernier.  Comment l'esprit pourrait-il sommeiller ? Lui qui est toujours en mouvement et en éveil. 

Notre corps n'est pas en état de suivre l'esprit dans son activité et c'est ainsi qu'apparaît le rêve, pendant lequel le corps se détache en quelque sorte de l'esprit et  s'abandonne au repos et à la récupération des forces.

Pendant ce  temps, l'esprit évolue  dans le monde.  Il est en mesure d'entrer en contact avec des esprits défunts ou des  univers spirituels en général.  Il est rare que l'on se souvienne des rêves en se réveillant le matin.  Il existe des rêves très ordinaires liés à l'évolution naturelle de l'esprit. Les  préoccupations normales de la journée se retrouvent  dans la nuit et s'enchaînent comme un film.

Il est difficile pour Dieu de communiquer avec nous quand l'homme se présente comme un miroir brisé où les messages spirituels eux-mêmes sont reçues de façon diverses et toujours fragmentaires. Chacun reçoit autant qu'il peut, compte tenu du miroir brisé avec lequel il vient au monde.

 
Conclusion

Seuls ceux qui ont esprit et cœur purs, purifiés des passions, libérés de leur pression par la puissance de l'Esprit Saint, peuvent avoir des visions, qui ne sont pas alors des songes.  Joseph et la Mère de Dieu ont eu visions et messages prophétiques. Le message intérieur que ceux-ci véhiculaient  venait de Dieu.

Pour faire notre salut, n’est-il pas préférable de nous diriger avec les Ecritures Saintes et les conseils des saints pères plutôt que de nous passionner pour les rêves et de leur faire confiance.

Divination, augure et songe sont des vanités. Les songes ont perdu bien des hommes qui espéraient en eux. Les récits des saints pères donnent de nombreux exemples de personnes qui ont péri pour y avoir cru.

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